Résumé :
Quatrième de couverture : Laure a dix-huit ans et elle part demain. En compagnie de sa mère qui lui a légué son goût pour la solitude, le silence et les voyages lointains ; puis enfin seule vers les rivages qui la font tant rêver.
De Paris à Nice, leur route s'étire au rythme capricieux d'une vieille voiture, d'étapes et de rencontres de hasard.
Au-delà du voyage et de ses mystères, se dévoilent le fil des souvenirs, les peurs et les désirs de ces femmes au moment fragile de la séparation.
Un roman intimiste et initiatique sur le voyage, la mémoire et l'oubli.
Anne-Sophie Stefanini est née en 1982. Elle est passionnée depuis son plus jeune âge par l'Afrique. Vers la mer est son premier roman.
Laure et sa mère Catherine s'apprêtent à faire un voyage. Elles prennent la vieille voiture, un tas de ferraille précaire qui crisse et qui grogne, pour traverser la France, de Paris jusqu'à Nice. De kilomètres en kilomètres la toile de souvenirs se déchire et se tisse. Les deux femmes quittent le cercle fermé de leurs connaissances pour se jeter à la terrible rencontre de l'autre et de soi-même. Le hasard semble les engloutir dans un tourbillon de souvenirs et d'envies.
Laure, comme sa mère avant elle, s'apprête à faire un voyage qui marquera son entrée dans la vie adulte. Comme sa mère elle rêve d'aventures et de contrées lointaines, elle se réfugie dans un Orient fantasmé au même titre que sa mère s'enracinait déjà dans l'âge d'or perdu de l'antiquité.
Vers la mer est à la fois le récit d'un départ et d'une rencontre. La mère et la fille apprennent à se connaître comme jamais elles ne l'avaient fait alors que la menace de la maladie d'Alzheimer plane sur leur destin.
Mon avis :
Le lecteur entre in medias res dans ce récit troublant. Directement, on a la persistante impression que des menaces qui ne disent pas leur nom planent sur le quotidien de la mère et de la fille. Une succession de petites parties, souvent intitulées d'un seul mot comme "l'étape" ou encore "l'accident" structurent le texte comme autant d'épreuves qu'il faut franchir. La première partie est la rupture, l'entrée dans le texte marque donc la fin d'un ordre ancien, d'une routine usée pour marquer le début d'autre chose. Les personnages qui semblaient se cacher les uns des autres se révèlent enfin.
Ce départ vers Nice a quelque chose de brutal, comme une action insensée et qui pourtant va de soi. Il y a pour Laure, comme une volonté d'aller à la rencontre de la vie. Catherine quant à elle, décide enfin d'affronter les fantômes de son passé, de regarder en face sa jeunesse qui s'enfuit et d'accepter la vie qu'elle s'est créée.
La figure paternelle brille par son absence. Ici, c'est la relation mère/fille qui est à l'honneur, comme un amour qui ne dit pas son nom. Les deux femmes ont de nombreux points communs, l'amour de la lecture, des voyages, un certain plaisir casanier et un attachement sans bornes à des idéaux enterrés ou inatteignables. Elles se jaugent et se jugent, comme s'ils elles étaient confrontées l'une à l'autre pour la toute première fois. Dans la vieille voiture, les mots échangés sont rares. Les paroles les plus importantes ne sont pas prononcées. En effet, l'auteur s'attache à nous dépeindre l'intériorité des personnages, leurs peurs cachées, leurs monologues intérieurs, leurs envies secrètes... Ainsi le voyage n'est plus seulement physique, mais il devient également spirituel. Laure et Catherine progressent dans leurs idées, dans leur relation à l'autre.
De plus, une menace discrète mais pourtant pesante couve le roman dans son entièreté : Alzheimer. Alors que la mère se sait ou se croit atteinte, la fille redoute d'en être affectée elle aussi. Ainsi, la mémoire, l'oubli et le prix des souvenirs sont autant de thèmes récurrents qui jalonnent le texte. Par le voyage, la mère ose également se confronter à ses souvenirs qu'elle avait pourtant relayés dans des cartons afin de prendre la maladie de vitesse et de refuser de se confronter à la réalité : l'oubli progressif de tout ce qu'elle a de plus cher.
La destination du voyage est également intéressante. La mer représente à la fois l'infini, la permanence et l'impermanence de toute chose. Elle porte également en elle la promesse d'un idéal fantasmé. Pour Laure, traverser la mer serait comme aller vers cet Orient mythique qui n'existe que dans les livres. Dans l'imaginaire, la mer représente également la frontière, entre les mondes, entre les peuples, entre les époques. Naviguer est comme voyager dans le temps. Nice est la ville d'enfance de Catherine, c'est là qu'elle a grandi, au bord de la mer. Pour elle atteindre la mer représente donc précisément ce retour dans le temps, ce retour à l'enfance et à l'antiquité symbolisée par Rome qu'elle a visitée alors qu'elle était plus jeune. Le voyage a également une portée initiatique, tel un pèlerinage, il façonne les corps et les esprits. Mais pour Laure s'agit-il plutôt d'un voyage vers la mer ou vers la mère?
Grâce à une écriture fluide et poétique, Anne-Sophie Stefanini nous transporte de port en port au rythme cahoté d'une vieille voiture et chaloupé d'une bouteille lancée à la mer.
Vous aimerez peut-être aussi :
Merci aux éditions JC Lattès pour ce partenariat. Merci également au site internet Livraddict pour avoir assuré son organisation.
Vers la mer est à la fois le récit d'un départ et d'une rencontre. La mère et la fille apprennent à se connaître comme jamais elles ne l'avaient fait alors que la menace de la maladie d'Alzheimer plane sur leur destin.
Mon avis :
Le lecteur entre in medias res dans ce récit troublant. Directement, on a la persistante impression que des menaces qui ne disent pas leur nom planent sur le quotidien de la mère et de la fille. Une succession de petites parties, souvent intitulées d'un seul mot comme "l'étape" ou encore "l'accident" structurent le texte comme autant d'épreuves qu'il faut franchir. La première partie est la rupture, l'entrée dans le texte marque donc la fin d'un ordre ancien, d'une routine usée pour marquer le début d'autre chose. Les personnages qui semblaient se cacher les uns des autres se révèlent enfin.
Ce départ vers Nice a quelque chose de brutal, comme une action insensée et qui pourtant va de soi. Il y a pour Laure, comme une volonté d'aller à la rencontre de la vie. Catherine quant à elle, décide enfin d'affronter les fantômes de son passé, de regarder en face sa jeunesse qui s'enfuit et d'accepter la vie qu'elle s'est créée.
La figure paternelle brille par son absence. Ici, c'est la relation mère/fille qui est à l'honneur, comme un amour qui ne dit pas son nom. Les deux femmes ont de nombreux points communs, l'amour de la lecture, des voyages, un certain plaisir casanier et un attachement sans bornes à des idéaux enterrés ou inatteignables. Elles se jaugent et se jugent, comme s'ils elles étaient confrontées l'une à l'autre pour la toute première fois. Dans la vieille voiture, les mots échangés sont rares. Les paroles les plus importantes ne sont pas prononcées. En effet, l'auteur s'attache à nous dépeindre l'intériorité des personnages, leurs peurs cachées, leurs monologues intérieurs, leurs envies secrètes... Ainsi le voyage n'est plus seulement physique, mais il devient également spirituel. Laure et Catherine progressent dans leurs idées, dans leur relation à l'autre.
De plus, une menace discrète mais pourtant pesante couve le roman dans son entièreté : Alzheimer. Alors que la mère se sait ou se croit atteinte, la fille redoute d'en être affectée elle aussi. Ainsi, la mémoire, l'oubli et le prix des souvenirs sont autant de thèmes récurrents qui jalonnent le texte. Par le voyage, la mère ose également se confronter à ses souvenirs qu'elle avait pourtant relayés dans des cartons afin de prendre la maladie de vitesse et de refuser de se confronter à la réalité : l'oubli progressif de tout ce qu'elle a de plus cher.
La destination du voyage est également intéressante. La mer représente à la fois l'infini, la permanence et l'impermanence de toute chose. Elle porte également en elle la promesse d'un idéal fantasmé. Pour Laure, traverser la mer serait comme aller vers cet Orient mythique qui n'existe que dans les livres. Dans l'imaginaire, la mer représente également la frontière, entre les mondes, entre les peuples, entre les époques. Naviguer est comme voyager dans le temps. Nice est la ville d'enfance de Catherine, c'est là qu'elle a grandi, au bord de la mer. Pour elle atteindre la mer représente donc précisément ce retour dans le temps, ce retour à l'enfance et à l'antiquité symbolisée par Rome qu'elle a visitée alors qu'elle était plus jeune. Le voyage a également une portée initiatique, tel un pèlerinage, il façonne les corps et les esprits. Mais pour Laure s'agit-il plutôt d'un voyage vers la mer ou vers la mère?
Grâce à une écriture fluide et poétique, Anne-Sophie Stefanini nous transporte de port en port au rythme cahoté d'une vieille voiture et chaloupé d'une bouteille lancée à la mer.
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Très belle critique chère Joyce ! Mais je ne pense pas que j'aimerais ce livre, s'il est trop porté sur la psychologie de deux femmes, sans trop d'actions, je ne pense pas que je tiendrais toutes les pages ^^
RépondreSupprimerPar contre, c'est assez paradoxal d'aimer voyager mais d'être casanier, ne crois-tu pas ? Encore une fois merveilleuse écriture :)
Merci! En fait, ces deux choses ne sont pas forcément paradoxales, je parle du sentiment casanier comme un besoin de solitude, un besoin d'avoir son espace à soi dans lequel se réfugier. Le voyage ne tranche pas forcément avec ces aspirations dans la mesure où on peut voyager seul dans une perspective d'errance. C'est plutôt le cas avec ces deux femmes.
RépondreSupprimerEn effet très beau billet que je n'avais pas voulu lire avant de rédiger le mien !!!
RépondreSupprimerIl manquait je petit je ne sais quoi pour en faire un coup de coeur, mais ce livre est néanmoins une très belle découverte, et un très beau moment de lecture.