Choeur de femmes tsiganes de Claire Auzias

Critique de Chœur de femmes tsiganes de Claire Auzias.

Résumé:

Quatrième de couverture: Les femmes qui déposent leur parole dans ce livre sont singulières. Gitanes, Manouches, Yenishes, Romnia, Sinti, voyageuses, toutes sont des femmes tsiganes. Elles ont bien d'autres identités : françaises, suisses, espagnoles, roumaines. Elles auraient pu être nos voisines à l'école primaire, au fond d'une classe, ou à la sortie du village, au bout d'un champ. À la périphérie de ma ville natale, elles vont et viennent toute une vie durant, autour d'aires de stationnement ou de terrains vagues. Ce qu'elles nous disent de leur quotidien n'est pas imaginable. Pourtant pas de révélation ni de sensationnel, pas de scoop ni de grand spectacle. Non. Humilité, menus propos, craintifs et sobres. Soudain, des voix se lèvent, à l'autre bout de l'Europe. Polyphonies qui disent leurs fiertés, leurs luttes, leurs défaites, leurs forces. Dans les replis de la vie tsigane, l'émancipation des femmes aussi a frappé. Elle balaie tous les jours les pratiques archaïques. Elle rit. Elle jongle avec le parler familier des femmes d'aujourd'hui. Quarante ans après la naissance du MLF, j'ai composé ce bouquet avec mes sœurs romnia qui nous rendent le goût de la liberté, de la pugnacité et ce mélange inégalable de gravité et de légèreté.

Cet ouvrage de Claire Auzias est en réalité composé d'une succession d'interviews réalisés par l'auteur auprès de femmes tsiganes. Plusieurs femmes "romnia" (qui appartiennent au peuple Rom) s'expriment donc au fil de ces pages et nous livrent quelques fragments de leur vie quotidienne : leurs soucis, leurs souvenirs ou encore leurs aspirations. Certaines sont sédentarisées d'autres sont restées nomades, certaines sont encore des jeunes filles et d'autres déjà des grand-mères, cette pluralité des voix donne un ensemble protéiforme qui nous propose une vision assez riche de ce que peuvent être les femmes tsiganes aujourd'hui.

Les interviews sont centrés sur des domaines tels que la perception de la femme dans ce milieu de vie, l'égalité des sexes ou encore la discrimination entre gadjé et tsiganes.

Mon avis:

J'étais tombée un peu par hasard sur ce livre dans un rayonnage de la bibliothèque près de chez moi en cherchant de la documentation sur le peuple Rom aujourd'hui. Je trouve l'utilisation de la forme des interviews très intéressante car elle permet de nous présenter des propos retranscrits sans modifications. On a donc parfois l'impression que ces femmes s'adressent directement à nous et le lecteur est alors plongé dans leur univers. La multiplicité des interviews nous amène également à considérer plusieurs points de vue cas si ces femmes sont toutes des femmes romnia elles mènent souvent des vies très différentes les unes des autres.

Claire Auzias s'intéresse à des points particuliers lorsqu'elle interroge ces femmes : elle dirige la conversation sur certaines coutumes tsiganes comme la virginité chez la femme avant le mariage (souvent précoce) pour constater leur évolution. Elle leur demande aussi si elles ont choisi leur mari ou si après leur mariage elles ont dû s'occuper de la belle famille avec un statut proche de l'esclave. Claire Auzias se renseigne aussi sur la contraception ou encore sur les discriminations. Ces sujets récurrents lui permettent de créer une base à chaque interview, le lecteur peut ainsi comparer chaque réponse sur des sujets voisins.

Personnellement il y a des interviews que j'ai appréciés plus que d'autres comme celui de Mona la peintre manouche ou encore celui de la fille de l'écrivain Matéo Maximoff. Certains de ces interviews ont étés réalisés avec des militantes, je les ais parfois trouvés trop spécialisés. Par exemple en interrogeant des militantes de Romani CRISS (Centre de recherche et d'interventions sociales pour les Roms), Claire Auzias se focalise sur le fonctionnement interne de cette structure sans que l'on soit renseigné sur son fonctionnement global, ses actions réalisées ou autre. J'ai donc parfois eu du mal à comprendre à quoi faisaient référence certains propos. Il m'a donc fallu faire des recherches sur certains événements mentionnés pour être à même d'appréhender les tenants et les aboutissants.

Ce livre est donc très instructif et a le mérite de nous présenter sans ambages la vie de quelques femmes romnia de nos jours. En effet, parfois on a une image fantasmée des tsiganes souvent teintée de préjugés, ce livre nous permet de clarifier nos idées sur ce point. Cependant il est vrai que par moments on a l'impression que l'ouvrage s'adresse à des personnes qui ont déjà fait des recherches approfondies et mènent un travail sur le sujet.

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